mardi 28 décembre 2010

Mon Ecran Radar vous souhaite une Bonne Année avec Owni Music !

2010 c'est No Future, n'est-ce pas Sid ?
Cher visiteur arrivé ici par la magie du Web, c'est aussi Noël Sur Mon Ecran Radar ! Cette fois nul article savant, coup de gueule ou prophétie hallucinée sur le journalisme et la révolution numérique pour ce dernier post de l'année 2010, le 45ème Ouf...Pour te remercier de ton intérêt, de ta fidélité, de ton indulgence pour mes divagations bloguistiques, je t'offre ce petit Best Of sonore de très bon goût concocté par mes amis d'Owni.fr sur OwniMusic. Par paresse temporaire du clavier (je suis en vacances tout de même ;). Au prétexte que Mon Ecran Radar est aussi un blog musical à ses heures (voir ce billet sur Patti Smith ou encore celui-ci sur David Bowie). Mais aussi parce que j'ai envie de te faire découvrir ces 14 artistes (français pour la plupart) dénichés et diffusés par mes amis de La Soucoupe: C.T.R.L, Birdy Hunt, Choklate, Cléo, Senbei, Puss in Boots...j'en passe et des meilleurs. De l'électro déjantée, du Punk futuriste, du rap et du groove syntéthique...que du miel musical pour tes oreilles, la BO de notre génération numérique !
Alors ENJOY LE SON (si tu aimes partage et diffuse)
et bien sûr...BONNE ANNEE 2011 !

samedi 11 décembre 2010

Et si Wikileaks ouvrait l'ère des Zones Autonomes d'Information ?

Julian Assange n'est sans doute pas le Messie que tous les contestataires de l'AlterNet attendaient. Et Wikileaks n'est peut-être pas cette "Agence de renseignement du peuple"  idyllique rêvée par son mystérieux et très warholien fondateur.Mais il est peut-être de ces hommes rares qui  accidentent l'Histoire et changent son cours en agissant comme un agent du Chaos créateur d'une réalité inenvisageable jusque-là: j'ai nommé les fameuses "Zones d'Autonomie Temporaire" (TAZ en VO abrégée) théorisées dès 1985 par le penseur cyberpunk, philosophe, poète et piratologue Hakim Bey dans "TAZ", un ouvrage évidemment libre de droit sur Internet et régulièrement actualisé depuis .
De quoi s'agit-il exactement ? 
"La TAZ est comme une insurrection sans engagement direct contre l'Etat, une opération de guérilla qui libère une zone (de terrain, de temps, d'imagination) puis se dissout, avant que l'Etat ne l'écrase, pour se reformer ailleurs dans le temps ou l'espace". 
Ce concept de "Zone Autonome Temporaire" a été rendu visible, de manière festive par les Rave et Free Party du mouvement techno. Et de la plus mauvaise manière, par les Black Blocks : ces militants "Autonomes" cagoulés et entièrement vétus de noir qui profitent de manifestations a priori pacifistes (anti-nucléaire, anti-G8, anti-OTAN...) pour "libérer" une zone de rue en affrontant (très) violemment la police. Des actions qui n'ont jamais reçu, à ma connaissance le soutien d'Hakim Bey, pour qui seule "la technologie libérée de tout contrôle politique rendrait possible tout un monde de zones autonomes". Dans "TAZ", écrit avant l'avènement du Web...et de Wikileaks, il estimait toutefois que "pour le moment ce concept reste de la science-fiction, de la spéculation pure"
Mais la récente publication par Wikileaks des 250.000 notes révélant les dessous de la  diplomatie américaine, après celle des "warlogs" irakiens et afghans et de leur lot de bavures commises par l'US Army (voir ce billet et la vidéo "collateral murder") a matérialisé l'utopie "TAZ" en l'appliquant au champ de l'informationEt ce à une échelle planétaire. Pour la toute première fois dans l'histoire, un messager venu de l'underNet a dicté son agenda à l'ensemble des médias du monde entier! 

lundi 6 décembre 2010

La guerre des robots aura bien lieu

Dimanche sur France Culture, Xavier de La Porte, qui anime l'excellente émission "Place de la Toile" a longuement cité un papier très fouillé de John Markoff du "New York Times" sur la robotisation en marche de l'US Army. Il se trouve que j'avais pas mal travaillé sur le sujet il y a quelques temps, lorsque j'étais reporter au service enquêtes de La Tribune. Les machines au service de la guerre me passionnent depuis tout petit, lorsque je lisais les "Histoires de Robots" de ce bon Docteur Asimov. Avec toutes les questions technologiques, éthiques et philosophiques que cela pose à l'humanité. Je publie donc ici une version actualisée, digest et largement remaniée de plusieurs papiers que j'avais consacré à ces vilains robots tueurs. Et oui, avant de virer totalement Gonzo, j'ai été un journaliste presque sérieux !

"Sasha", Enki Bilal, planche de l'album "32 décembre"
« Le drone avait surgi […]. Une libellule géante de carbone et de réfractaire noir longue de trois mètres, dotée de deux ailes ultracourtes, d’une dérive et de deux microrotors.D’une batterie de senseurs thermiques.D’un canon rotatif de 14,5 mm […]. Et du sang-froid des machines. Les senseurs étaient en action, les lumières rouges caractéristiques clignotaient sous sa tête bombée d’hydrocéphale tueur […]. II y eut simplement un éclair blanc […]. Et le bruit terrifiant du canon vrilla l’atmosphère» : dans son roman Babylon Babies (Gallimard, La Noire, 1999), l’écrivain « cyberpunk » Maurice G.Dantec décrivait de manière saisissante l’entrée en action d’un drone de combat dans un futur proche (2013), ravagé par une guerre sans fin. La réalité a largement rattrapé la science-fiction : en Irak, en Afghanistan et ailleurs, l’armée américaine emploie aujourd’hui en permanence plus de 2000 drones, dont les fameux Predator et Global Hawk, pour tenter de débusquer un ennemi insaisissable. Conçus pour l’observation et le renseignement, ces inquiétantes machines volantes servent aussi désormais à des missions léthales : la CIA et le Shin Beth israélien ont utilisé des « drones tueurs » à de nombreuses reprises pour éliminer d’un tir de missile des « terroristes » en vadrouille dans le désert… 

jeudi 2 décembre 2010

Ce que nous dit Houellebecq: l'humanité est obsolescente

De quoi Michel Houellebecq est-il le nom ? De quoi nous parle-t-il de livre en livre ?  Je me pose la question de Badiou depuis que je le lis. C'est à dire depuis son "Extension du domaine de la lutte" paru en 1994. Et je crois avoir trouvé une partie de la réponse dans son dernier ovni littéraire goncourisé, "La Carte et le Territoire", sorti en cette rentrée littéraire chez Flammarion (lire ici l'excellente critique de Claire Devarrieux dans "Libération"). Elle est là, lumineuse dans les pages de ce diamant noir qui lui vaut enfin la reconnaissance en tant qu'écrivain et témoin majeur de notre tournant de siècle :

"Alors que les espèces animales les plus insignifiantes mettent des milliers, parfois des millions d’années à disparaître, les produits manufacturés sont rayés de la surface du globe en quelques jours. Nous aussi nous serons frappés d'obsolescence" comme des "produits culturels voués à disparaitre".
Obsolescence...du latin obsolescens, participe passé d'obsolescere: "tomber en désuétude". Faisons comme l'auteur, pour expliciter, référons nous en à Wikipedia en assumant ce plagiat-collage créatif à la manière de Perec dont il est injustement accusé pour son dernier livre : en économie, "l’obsolescence est le fait pour un produit d’être dépassé, et donc de perdre une partie de sa valeur en raison de la seule évolution technique, même s'il est en parfait état de fonctionnement", rappelle fort justement l'encyclopédie en ligne collaborative. Nous y sommes...

samedi 27 novembre 2010

Portishead, F****** Good Trip

Depuis quelques temps déjà, ce blog a pris une drôle de tournure sonique. Il y a eu ce post sur David Bowie, puis celui-ci sur Patti Smith. Moins de billets technos/médias, marre de radoter sur notre déroute journalistique...Envie de vous parler musique, photo, littérature, culture, vie...toujours à l'aune de la grande mutation numérique. Envie d'échanges intellectuels et plaisir aussi, découvrir et faire découvrir d'autres plumes folles. Et voilà que j'ai reçu cet Ovni éditorial comme une météorite en plein blogger. La divine Corinne, @Co_SwEuphoria sur Twitter, nous emmène dans son trip Portishead avec un gonzo-style inimitable et une culture musicale impeccable. La grande classe: 
  
Parce que des dates de concert  sont enfin tombées, 23-24 juillet 2011 , parcequ'il fait froid et que l’été prochain sera (trip) hot parce que Portishead reviendra sur scène à Londres pour superviser (de main de maître vu le line -up à miauler de bonheur qui se dessine) les fameuses "All Tomorrows Parties" (Tonton Lou, coucou) . Parce ce que le trio de Bristol nous a promis un nouvel album,  parce que le side-project de Geoff Barrow (Beak) je m’en fous un peu je l’avoue, parce qu’en réalité  la voix, cette voix unique, celle de Beth Gibbons me manque atrocement..Parce que j’ai eu envie de l’entendre, de les entendre tous les trois.  La dernière fois c’était "Third" justement... un 28 Avril 2008 et je me suis payée le luxe d’un trip (hop) nostalgique…Embarquement..pour le grand huit, pardon "Third"...
C'est un conte incroyable . Celui dont on ne se remet réellement jamais. Le coup de foudre. Une puissante ivresse qui, sans crier gare,vous serre la gorge et vous tourne la tête et vous colle un sourire infini sur le visage... Un accroche-cœur éternel. C'est comme une expédition himalayenne sans oxygène.. Et du haut de la montagne (façon de causer), j'ai vu la lumière, "Third", un disque renversant , dont je n'attendais pas grand-chose, j'adôôre "Dummy" mais je n'ai jamais été une fondue hardcore du gang...Et puis ce fameux soir d’Avril il y eut "Third", mes doigts frétillants sur le livret, mes yeux révulsés de plaisir, mes oreilles extatiques…Un voyage en  eaux troubles...

mardi 23 novembre 2010

Patti Smith, passeuse de mémoire rock'n roll et analogique

Elle nous parle d'un temps où la littérature et la musique, l'art et la culture n'étaient pas encore des produits dématérialisés vendus sur Amazon et l'iTunes store par des "industriels du contenu". Une époque analogique où un livre, un disque, un tableau ne se consommaient pas en deux clics et pouvaient changer radicalement votre vie, faire de vous un auteur, un artiste, sans passer par la case "Star Academy". 
Pour Patti Smith ce fut la rencontre, à 16 ans, d'Arthur Rimbaud
"Son regard hautain sur la couverture des 'Illuminations' accrocha le mien. Il était doté d'une intelligence irrévérencieuse qui m'enflamma, et je l'adoptai comme mon compatriote, mon frère et même mon amant secret. Comme je n'avais même pas 99 cents pour acheter le livre, je l'ai fauché", raconte-t-elle dans "Just Kids", sa très belle autobiographie qui vient de sortir en français chez Denoël (voir la critique des "Inrocks" et celle de "Télérama"). S'en allant les poings dans les poches crevées de son paletot, le jeune poète aurait sans doute adoré l'idée d'être volé par une soeur de bohème à un siècle de distance.

lundi 15 novembre 2010

Que penser du "journalisme de données" ? On en parle sur France Culture...

Le journalisme est d'abord affaire de chair et de récit. C'est une science humaine imparfaite et subjective qui se prête difficilement à toute tentative de rationalisation informatisée...C'est ce que j'essayais d'expliquer ce dimanche 14 novembre sur les ondes de France Culture où j'étais invité à débattre du "data-journalisme" par Xavier Delaporte, le producteur de l'excellente émission Place de la Toile. Autour du micro face à moi (?), deux jeunes et néanmoins brillants spécialistes de ce fameux "journalisme de données": Caroline Goulard d'ActuVisu et Nicolas Kayser-Bril du site Owni. Ensemble nous avons gentiment refait le match d'une discussion initiée sur ce blog.
Depuis ce billet un peu polémique où je m'interrogeais sur la pertinence de cette nouvelle technique consistant à présenter l'information sous forme exclusivement visuelle, je fais figure de grand détracteur de ce fameux "journalisme de données". Car je crois encore et toujours qu'une belle plume vaut bien mieux que tous les tableaux Excel au monde pour raconter le réel avec des morceaux d'humanité dedans. Et je crois aussi que le lecteur est encore capable de lire 5000 signes voire plus, si on lui raconte une histoire de son temps. Je ne suis pas d'accord avec ceux qui pensent "qu'une image vaut mille mots" ou qui estiment que "dans un monde d'hypercommentaires la véritable médiation de la réalité se fait par la données" (comme l'écrivait Nicolas Vambremeersch dans un article publié par Slate).

dimanche 7 novembre 2010

Autant en emporte nos images...

"Mort d'un soldat républicain", photo prise par Robert Capa le 5 septembre 1936
Robert Capa saisissant l'instant précis où la balle franquiste fauche un milicien républicain espagnol, à Cerro Muriano, quelque part sur le front d'Andalousie. J'ai toujours aimé cette photo. D'abord parce que c'est l'une des meilleures photos jamais prise par un reporter de guerre. Je l'aime aussi pour ce qu'elle représente de politique et de prophétique: l'espoir et la liberté assassinés par le fascisme dès 1936 dans la lâche indifférence des grandes démocraties occidentales. Je l'aime enfin et surtout parce que l'oeil du photographe a su capter et transmettre miraculeusement* jusqu'à nous cette vie coupée en deux, un infime fragment d'histoire individuelle broyée dans le grand chaudron de l'Histoire en train de se faire.

Peut-on encore faire aujourd'hui une photo ayant cette puissance symbolique unique, à l'heure de l'overdose d'images dématérialisées déferlant sur tous les écrans de notre vie ? A force de la banaliser à coup de megapixels démultipliés à l'infini et de gigaoctets stockés sur nos disques durs, la civilisation numérique est-elle en train de tuer la photographie au sens où on l'entendait depuis son "invention" par Nicéphore Niépce en 1826 ? C'est que je me demandais l'autre jour en sortant de la très belle expo Larry Clark, l'un des rares photographe et réalisateur de cinéma à avoir su capter l'éphémère éternel de l'adolescence (à ce sujet voir ce billet de ma consoeur Capucine Cousin et celui-ci sur le blog de Diane L'actu à la loupe). Et je me posais hier soir la même question en sortant du cinéma. Vu "L'homme qui voulait vivre sa vie", ou comment un Romain Duris fugitif tue le winner digital  qu'il était devenu pour tenter de renaître à la vie à travers le viseur d'un vieux Nikon qui le révèle à lui-même comme dans un bain argentique...

lundi 18 octobre 2010

Mon Ecran Radar en lice pour les Golden Blog Awards

Ce n'est pas que je cours après les récompenses - "on gouverne les hommes avec des hochets" disait Napoléon - mais on blogue évidemment pour être lu. Et pour être lu, il faut bien faire connaître son blog. CQFD. Alors après le Prix du meilleur blog High-Tech remporté en janvier par Mon Ecran Radar à la Coupe de l'Info, je me suis mis en tête de postuler aux "Golden Blog Awards" pour faire un peu de buzz . Un Prix soutenu par la Mairie de Paris, qui comme son nom l'indique, a l'ambition d'être à la blogosphère française ce que sont les Césars aux cinéma, les Victoires à la musique ou les Molières au théatre... Rien que ça ! La première édition de cette cérémonie organisée "par les blogueurs pour les blogueurs" se déroulera le 17 novembre sous les dorures de l'Hôtel de Ville de Paris.
Mon Ecran Radar postule dans la catégorie "Actualités Web". Si vous êtes un(e) fidèle de ce blog ou si vous êtes tombés dessus au hasard de vos divagations sur le Web, vous pouvez voter ci-dessous pour me soutenir et me donner une chance de remporter  le joli presse-papier qui fait office de trophée. 



Vos voix seront prises en compte
dans le choix du Jury.





samedi 9 octobre 2010

David Robert Jones, l'homme qui s'est dématérialisé


""Ground control to Major Tom, Ground control to Major Tom...", chantait David Robert Jones en 1969, l'année où l'homme a marché sur la Lune...A première vue, "Space Oddity" évoquait dans ses enluminures psychédéliques un astronaute qui perdait peu à peu le contact avec sa mère Planète. En réalité, l'histoire d'un toxico s'éloignant de la vie à chaque injection - "Lift Off" - avouée dix ans plus tard dans les paroles de "Ashes to Ashes" ("You know Major Tom was a junkie")... Un flash à demi-prémonitoire à la manière du "When I'm Sixty Four" du Beatle Mc Cartney. Car quatre décennies plus tard, l'homme que l'on appelait David Bowie ne répond plus. Rangé des substances - poudre au nez - qui ont bien failli le rendre fou paranoïaque pendant sa trilogie Berlinoise, il s'est comme dématérialisé.

lundi 4 octobre 2010

L'Homme "augmenté" selon Google...vers une transhumanité diminuée ?

"Ce que nous essayons de faire c'est de construire une humanité augmentée, nous construisons des machines pour aider les gens à faire mieux les choses qu'ils n'arrivent pas à faire bien"...On ne pourra pas dire que nous n'avons pas été prévenus. Mais, étrangement, cette déclaration programmatique d'Eric Schmidt est pratiquement passée inaperçue en dehors des cercles technophiles concernés.
Le PDG de Google a pourtant clairement annoncé la couleur fin septembre à la conférence TechCrunch de San Francisco : "La" Firme Internet ambitionne désormais de rendre son moteur de recherche suffisamment "autonome et intelligent" pour deviner nos désirs, faire de notre découverte du monde "un heureux hasard" calculé par les algorithmes sorciers concoctés par les cerveaux oeuvrant au Googleplex de Mountain View.
Si l'on en croit Herr Doktor Schmidt, il viendra un jour où Google pensera le monde à notre place, nous proposant des suggestions avant même que nous ayons tapé la moindre recherche sur notre clavier AZERTY : "Je m'intéresse à l'histoire ? Je veux que mon smartphone me raconte l'histoire de l'endroit où je suis sans lui avoir demandé", a expliqué le boss de Google pour illustrer son propos. Eric Schmidt nous annonce pour demain - cette décennie - un Futur radieux où le divin moteur devinera dans nos pensées pour nous aider à vivre, travailler, nous éduquer, nous informer, aimer... où YouTube et Google TV vous proposeront à chaque instant des programmes taillés sur mesure en fonction de vos goûts, où Google News nous livrera en temps réel une actualité ciblée sur nos seuls centres d'intérêt, où nos voitures conduiront toutes seules guidées par Google Maps...Blablabla.  

mercredi 29 septembre 2010

Pour un journalisme à l'état sauvage

"En vérité, je vous le dis, il faut aller au-delà du journalisme, retrouver la puissance brute des mots, être sauvage. Le journalisme standardisé tel qu'il se pratique aujourd'hui ne suffit plus à décrire le réel dans sa morne et bête brutalité"...Je devais être dans un mauvais jour, l'autre jour, quand j'ai tweeté ces quelques mots rageurs en deux fois 140 signes. Je pensais au journalisme comme Cioran pensait à la littérature en écrivant "Je rêve d'une langue dont les mots, comme les poings, fracasseraient les mâchoires" (merci à @CapAlexandre qui m'a rappelé cette citation lors d'un échange sur notre site de micro-blogging préféré). Je pensais aussi à cette Twitstory de l'ami @christreporter : "Nous ne sommes pas nés pour être domptés. Nous sommes des bêtes sauvages qui savent jouer les animaux dociles". Cela vaut pour le journalisme ici et maintenant, me disais-je.
Encore un de ces pronunciamento dont j'ai le secret qui ne va pas arranger mon e-reputation de Matamore de la presse. Peut-être...Mais en y réfléchissant à deux fois, je me suis rendu compte, qu'au fil de mes tweets et billets de blog, je creusais avec acharnement, et depuis des mois, le même sillon pour y planter le germe de cette Idée Rousseauiste qui tournait en boucle dans ma tête
"Aller au-delà du journalisme standardisé, retrouver la puissance brute des mots, retrouver l'état sauvage pour décrire la brutalité du réel".

lundi 20 septembre 2010

Bloguer est un sport de combat...j'en parle sur RFI

Mon Ecran Radar s'invite sur les ondes. Enfin c'est plutôt le contraire...;-) Après mon passage à  la Radio Suisse Romande en juin dernier, j'ai été convié la semaine dernière au micro de Radio France Internationale (RFI) pour parler de mon travail de journaliste-blogueur en plein chambardement numérique. J'ai passé un  excellent moment avec Ziad Maalouf et Cédric Kalonji qui animent ensemble l'émission Mondoblogs de l'Atelier des Médias. Paradoxalement, c'est mon billet de rentrée sur les affres du blogging  et mes doutes concernant l'avenir de cette expérience blog qui m'a valu cette invitation ! 
Regonflé à bloc depuis, j'ai eu tout loisir de décliner mes obsessions habituelles : bloguer est un sport de combat, l'écriture est une souffrance jouissive, Twitter c'est une drogue dure, nous sommes tous des répliquants numériques... Tout y passe avec mon débit de mitraillette digne de Jean-Luc Delarue (les 5 grammes de CC par jour en moins, je vous assure ce blog est 100 % bio...). Les habitués ne seront pas dépaysés. Si j'ai bien compris, l'émission sera diffusée le samedi 25 septembre à 11h30 sur la fréquence 89.0 et webcastée dans la foulée sur le site de l'émission.
 
Voilà j'espère ne pas avoir dis trop de bêtises. Vous en jugerez en cliquant sur le podcast ci-dessous que mes amis de RFI m'ont déjà envoyé en avant-première, histoire de m'aider dans ma vile entreprise d'auto-promotion. Rien que des brandeurs ces journalistes qui trainent sur Twitter ! C'est Libération qui le rappelait récemment dans ce papier. D'ailleurs figurez vous que Steven Jambot était luin aussi dans le studio ;-)

samedi 11 septembre 2010

Frères humains, qu'est-ce que Twitter fait de nous ?


Le répliquant Roy joué par Rutger Hauer dans le final de "Blade Runner"
"A force de vie irréelle, peut-être dirons nous un jour aux gens IRL (in real life) : j'ai vu tant de choses que vous humains ne pourrez jamais voir"... Cette semaine, j'ai tweeté à deux reprises cette réflexion personnelle inspirée de la scène finale de "Blade Runner". Les  @Garriberts de "Libé" me l'ont fait remarquer. Je les en remercie ici, ils ont fait germer l'idée, l'envie d'écrire de ce billet. Voilà ce que je leur ai répondu: "J'adore me répéter dans le bruit de nos gazouillis, prêcher K.Dick dans le désert confus de la Twittosphère".  
Prêcher ? Oui pourquoi pas. Car, frères humains, je m'interroge de plus en plus : mais qu'est-ce que Twitter est en train de faire de nous ? Des "répliquants" numériques peut-être... Comme un medium esquissant l'un de nos futurs possibles dans ses livres uchroniques, le génial Philip K. Dick l'avait prédit dans "Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques", le formidable roman de "SF" qui servit de base au scénario du "Blade Runner" de Ridley Scott : un jour, il nous sera sans doute impossible de distinguer l'homme de la machine, les êtres réels de leurs simulacres...

mardi 7 septembre 2010

Mon Ecran Radar Année 2.0

Illustration empruntée à Loulou Picasso
Que faire ? Qu'en faire ? Ce blog en forme de laboratoire numérique et journalistique très personnel a bientôt un an et je me pose la question de Lénine depuis déjà quelques temps. Près de 60 chroniques plus tard, je sens que j'arrive au bout de quelque chose, que j'ai atteint une pierre de touche. 
Au commencement était l'enthousiasme brouillon pour ce nouveau média à la première personne. Je me suis lancé dans cette aventure, sans réfléchir, étendard au vent et clavier en bandoulière avec la vague idée de prolonger sur le Web mon travail de journaliste de presse quotidienne spécialisé dans les nouvelles technologies et les médias. Et aussi, c'est vrai, de lancer un radeau digital sur la mer démontée qui fait tanguer jusqu'aux plus fiers paquebots de la presse parisienne. Pour être encore là, d'une manière ou d'une autre, quand l'encre, le papier et les rotatives qui m'ont fait journaliste ne seront plus...
Après quelques billets, j'ai vite perçu le double écueil qui guettait mon fragile esquif : faire un blog de journaliste Geek avec plein de gadgets et de branlette technologique inside, et/ou un blog Médias comme les autres, chroniquer le vain théâtre des intrigues cathodiques avec plein de people et paillettes dedans. Et puis l'évidence s'est imposée. Puisque ces deux univers sont en voie de fusion accélérée dans le grand Synchrotron numérique. 
Puisque les frontières entre tuyaux et contenus tombent les unes après l'autre comme l'avait prédit Saint Jean-Marie Messier à l'aube de l'an 2000 (j'étais parmi ses apôtres suivant religieusement ses faits et gestes)...pourquoi ne pas chroniquer au jour le jour les effets sismiques ou papillon de cette révolution digitale sur mon métier de journaliste, nos vies de citoyens, celles de nos enfants-mutants,  l'actualité, l'histoire et la culture en train de se faire et de se défaire au rythme frénétique des innovations technologiques ? Et pendant que j'y suis pourquoi ne pas y mettre un peu de moi, du jeune punk naïf et révolté que j'étais au journaliste installé mais un peu bravache que je suis resté ?

mardi 3 août 2010

Hunter Thompson (2)...et maintenant le biopic !

Vous avez aimé mon précédent billet sur la leçon de journalisme de Doc Thompson ? Vous voulez en savoir plus sur l'énergumène ? Au-delà de la formidable biographie dont je vous ai déjà parlé ("Journaliste et hors-la-loi" de William McKeen),  je vous recommande l'excellent film "Gonzo : the life and the work of Hunter Thompson" sorti en 2008 aux Etats-Unis à l'initiative du studio indépendant  Magnolia Pictures. A ma connaissance, ce documentaire - qui a pourtant été primé au Festival du film indépendant de Sundance -  n'est malheureusement pas sorti en France...mais à défaut on peut évidemment se le procurer online par tous les moyens consacrés ;-). Pour son film, le réalisateur Alex Gibney a rencontré tous les témoins encore vivants de ce que furent la vie déjantée et les fulgurances journalistico-littéraires du Doc : entre autres Johnny Depp qui interpréta le rôle cartoonesque du "Duke" dans "Las Vegas Parano", l'immense Tom Wolfe à qui Hunter vouait une grande admiration réciproque, l'ancien président Jimmy Carter dont il couvrit la campagne électorale avec une bienveillance inattendue, Ralph Steadman son dessinateur gonzo attitré, et bien sûr Jann Wenner, le fondateur de "Rolling Stone Magazine" qui obtint de lui ses meilleurs papiers sans toujours le payer...  

samedi 31 juillet 2010

Le journalisme selon Hunter S. Thompson (1)

Depuis ce billet en forme d'hommage à la prose hallucinée de Hunter S. Thompson - "I wanna be a Gonzo journalist" - vous connaissez ma passion pour ce bon vieux "Duke", auteur entre autres des génialissimes "Hell's Angels" et "Fear and Loathing in Las Vegas". A la faveur des vacances, je relis donc les œuvres complètes de Doc Hunter, inventeur dans le sillage de Tom Wolfe ("L'Etoffe des Héros", "Le Bûcher des Vanités"...) d'une nouvelle forme de narration journalistique à mi-chemin entre fanzine et littérature... Ça vous regonfle à bloc un journaliste-blogueur bousillé ;) Je me suis aussi replongé dans l'excellente biographie du grand homme signée William Mc Keen: "Journaliste et hors-la-loi" (Editions Tristam). Rien que le titre donne envie !
Mais c'est en lisant cette phrase...

 "Je n'ai pas encore trouvé de dope qui puisse vous faire monter aussi haut qu'être assis à un bureau à ecrire"

lundi 5 juillet 2010

"Internet est une formidable opportunité de casser les codes journalistiques"

Ceci n'est pas une auto-interview ! Je suis un peu mégalo comme la plupart des plumitifs mais tout de même... Non cet entretien sur l'avenir du métier de journaliste est le fruit d'une rencontre avec Grégory Rozières, un jeune étudiant en 3ème année de journalisme à l'ISCPA qui m'a demandé (avec d'autres confrères) de me prêter au jeu des questions-réponses dans le cadre de son mémoire de fin d'études consacré au journalisme sur internet (à télécharger ici). Merci à toi Grégory qui a su mettre un peu d'ordre dans les méandres de ma pensée embrumée et le stacato de  ma parole caféïnée. Merci aussi de m'offrir matière à faire patienter les fidèles de ce blog en attendant un nouveau billet tout frais tout neuf à mon retour de vacances...c'est à dire mi-août. 
D'ici là bel été à tous ! Essayez de déconnecter un peu, la vraie vie IRL - soleil, plage, coquillages et crustacés - c'est quand même bien mieux que toutes ces journées et ces nuits No Life passées toute l'année devant l'écran blafard de nos ordis ;-)

Vous vous définissez comme un journaliste "old school"...comment êtes-vous venu au journalisme web ?
Je suis venu au web ces trois dernières années pour plusieurs raisons. Tout d’abord j’ai compris qu’il y avait un changement de paradigme important : l’information est en train de se dématérialiser, de la même manière que la musique s’est dématérialisée. Pour un journaliste, il faut évidemment être en ligne pour répondre au changement d’habitude de consommation des lecteurs. 
Il n’y a qu’à voir les chiffres de la presse quotidienne. Les moins de 30 ans s’informent sur internet, ils ne consomment plus de journaux, ce qui pose un problème économique pour nous car c’est la gratuité qui domine. De plus, à titre personnel j’ai eu besoin au bout d’un moment de trouver quelque chose de personnel sur internet : une certaine liberté de ton bien sûr, mais surtout un contact direct avec le lecteur. C’est quelque chose que l’on cherche forcément dans le métier mais qui n’a jamais vraiment été efficace sur le papier. Le courrier des lecteurs a toujours été géré comme une corvée par manque de temps. Internet permet d’avoir ce rapport. Le blog que j’ai lancé il y a presque un an m’a ouvert les yeux, beaucoup plus que je ne m’y attendais. L’irruption de Twitter a aussi beaucoup changé les choses pour le métier de journaliste. C’est un outil à mon avis avant tout professionnel, ça m’a amené à être beaucoup plus en temps réel sur l’actualité.

jeudi 10 juin 2010

Crise de la presse et révolution numérique...j'en parle au micro de la Radio Suisse Romande

Mon Ecran Radar est comme l'Internet...il n'a pas de frontières ! Ce blog compte déjà quelques amis fidèles dans les pays francophones, du Québec à la Belgique en passant par la Suisse et le Maghreb. Et ce jeudi 10 juin à 9h30, la Radio Suisse Romande (RSR) m'a invité à venir parler de la crise de la presse qui s'accélère en France et ailleurs; de la révolution numérique qui bouleverse les modes de consommation des médias et leur business-modèle; des "Echos" (mon journal) sur l'iPad; ou encore de ce que peuvent apporter les blogs à la presse avec l'exemple du Huffington Post dont je vous parlais récemment.

 Martine Galland et Alain Maillard, co-animateurs de l'émission "Médialogues" sur la Première de la RSR, ont eu la gentillesse de me tendre le micro pour un direct d'une vingtaine de minutes. J'ai passé un très bon moment, j'espère ne pas avoir dis trop de bêtises... 

Jugez-en par vous mêmes, le podcast est en écoute ici :

 Et en prime, voilà une petite interview que j'ai donné à la RSR avant l'émission en direct à propos de mon expérience  de journaliste sur Twitter et ce blogs : "une drogue dure et un sport de combat", je vous assure !

http://medias.rsr.ch/la-1ere/programmes/medialogues/2010/medialogues_20100615_standard_sequence-4_20100615-0950_67265190-ce6c-4795-ac75-d308c51ec877-128k.mp3

lundi 7 juin 2010

Mon futur red chef est une World Company du Net

 
(Photo tirée du "2001 l'Odyssée de l'espace" de Stanley Kubrick)
"Ton vaisseau-mère Gutenberg a fait naufrage ou divague déboussolé en attendant le coup de grâce final du grand orage digital ? Viens à moi pauvre petit journaliste perdu dans l'immensité du cyberspace comme un astronaute bientôt à court d'oxygène..."
C'est ce que j'ai cru entendre ce week-end, lorsqu'au hasard de mes divagations sur le Web, je suis tombé sur plusieurs indices informationnels laissant à penser que les Titans de l'ère numérique seront bientôt les seuls employeurs à bien vouloir recruter et payer des journalistes pour pisser de la copie sur tous les écrans de notre vie. Mon rédac chef s'appelle Yahoo! ou AOL...ce n'est plus de la Science-Fiction. C'est déjà demain !
Comme un vent de déroute
Vous n'y croyez pas ? Observez l'enchaînement implacable des évènements. Aux Etats-Unis, une douzaine de quotidiens ont stoppé leurs rotatives entre 2008 et 2009. Parmis eux des titres plus que centenaires comme le "Rocky Mountain View" de Denver Colorado,  le "Kentucky Post" du puissant groupe Gannett, ou encore le "Baltimore Examiner" dont l'histoire remontait pratiquement à la guerre d'indépendance... Les Prix Pulitzer accrochés aux murs des salles de rédaction comme autant d'ex-voto n'y ont rien fait. Rideau, terminé. La liste de ce cimetière des éléphants de la presse US est ici sur Newspaper Death Watch. Et la grande faucheuse de l'imprimé arrive maintenant chez nous. On n'est pas encore à fermer boutique, mais il y a comme un vent de panique et de déroute aujourd'hui dans la "grande" presse parisienne.

samedi 29 mai 2010

La blogosphère au secours de la vieille presse ?

 (dessin emprunté au "New-Yorker")
Ami Blogueur, tu te sens comme une pauvre particule de plancton flottant anonymement dans un océan informationnel en perpétuelle expansion ? Ami TwitterJunkie, tu uses tes jours et tes nuits à gazouiller de la News en 140 signes pour être à l'avant-garde de l'avant-garde de la révolution journalistique et numérique...et puis un jour tu te demandes : à quoi rime tout cela ? Ce déluge de mots qui s'écoule comme le temps qui passe sur le sablier de ta "time line"... Mais voilà une nouvelle venue d'outre-Atlantique qui aura peut-être pour effet de réinjecter un petit shoot de dopamine dans tes neurones fatigués et de te redonner un peu
d'enthousiasme devant le clavier:
Lancé il y a seulement cinq ans, le HuffingtonPost a fait le pari de s'appuyer sur le meilleur de la blogosphère américaine plutôt que sur une rédaction de journalistes professionnels : il talonne désormais sur internet le "New York Times" avec 12,3 millions de visiteurs uniques aux Etats-Unis contre 13,1 millions pour la "vieille dame grise" (bientôt 160 ans au compteur) ! C'est l'institut Comscore qui a récemment publié ces chiffres pour le mois de mars. Le site fondé par la journaliste politique américaine Ariana Huffington et son confrère Ken Lerer avait déjà coiffé au poteau ce bon vieux "Washington Post" en fin d'année dernière, et devance largement le grand "Wall Street Journal" comme le montre le graphique ci-dessous :

(Source: Comscore)

mercredi 26 mai 2010

La standardisation de l'info va-t-elle tuer le journalisme ?

Aujourd'hui, le journalisme au long cours - celui qui privilégie l'enquête, le récit et de reportage - a bien du mal à exister et à survivre face à la logique productiviste et au diktat du marketing éditorial qui règnent en maîtres dans les rédactions. Si vous êtes déjà venus sur ce blog, vous savez que j'ai en horreur cette "junk news" que l'on produit et que l'on consomme à flux tendu comme de la malbouffe informationnelle. Comme d'autres confrères qui ont connu l'avant "journalisme Shiva", j'aimerais que la presse redonne un peu de temps au temps, privilégie à nouveau la qualité sur la quantité, qu'elle soigne un peu plus la forme et le fond. Sur internet comme sur le papier. Lisez ou relisez ce billet foutraque sur le gonzo-journalisme, ou bien ce plaidoyer pour le journalisme de récit, ou encore cette charge sauvage contre le robot-journalisme ...vous constaterez que je fais une véritable fixette sur le sujet ;-)
C'est sans doute pourquoi la revue Médias [2] m'a récemment demandé de participer à une émission de Web-TV sur le thème "La standardisation de l'information va-t-elle tuer le journalisme d'auteur ?". J'étais d'autant plus heureux (et flatté) de participer à ce débat animé par Robert Ménard quand j'ai su qui étaient les deux autres invités sur le plateau : Pierre Péan, le grand journaliste-enquêteur que l'on ne présente plus, et Jean-Robert Viallet qui a reçu le Prix Albert-Londres pour son excellente trilogie documentaire "La Mise à mort du travail"... Autant dire que je me suis senti un peu léger face à ces deux stars du journalisme français.Mais bon j'espère ne pas avoir trop dit de bêtises. L'émission est en ligne. Commentaires bienvenus !




"Pour une bonne enquête, seul le temps compte, peu le talent" (Pierre Péan)
"Trois semaines d'enquête? Un luxe" (Jean-Christophe Feraud)
"Un scoop ne se cherche pas, il arrive par hasard" (Pierre Péan)
"On est persuadé que les lecteurs veulent du court, c'est faux" (Jean-Robert Viallet)

mardi 11 mai 2010

Le piège tendu par Google à la presse


 

Je vous l'avais annoncé en mars je souhaite ouvrir un peu plus Mon Ecran Radar à des contributions extérieures. Nous avions inauguré cet exercice "open source" avec ma consoeur Solveig Godeluck, qui avait réalisé une interview passionnante de Renaud Chareyre auteur de "Google Spleen".
Le même Renaud Chareyre revient aujourd'hui avec ce nouveau billet à charge contre Google initialement publié sur son blog. Pour lui, la mainmise du géant du Web sur la publicité en ligne risque d'empêcher définitivement la "vieille" presse de trouver un modèle économique viable sur internet. Débat passionné en perspective entre anti-Google et Google-maniacs...

"Presse : embuscade pour un massacre", 
par Renaud Chareyre
Le journalisme de plume, indépendant, le journalisme d'analyse et d'investigation, sans concession, cela devient rare, nous dit-on. Les lignes éditoriales s'étiolent sous le poids du façonnage marketing, de la chute des ventes des éditions papiers, des restrictions de recettes publicitaires, des réductions d'effectifs, des impératifs de rendements... Pour grappiller de l'audience sur tous les écrans, la course à la production impose la tendance d'un reformatage à faible valeur ajoutée des dépêches et des communiqués. La presse écrite assisterait à son propre enterrement, emportée par la vague numérique.
Le 02/04/10 dans "Libération", Laurent Joffrin estimait nécessaire "d'améliorer les comptes des producteurs d'information sur le Net, aujourd'hui pressurés". Il regrettait que "ceux qui transportent les contenus ou qui les agrègent captent l'essentiel du chiffre d'affaires, alors que ceux qui les produisent supportent l'essentiel des coûts". Par un cycle économique infernal, moins de ressources pour les salles de rédaction, c'est moins de moyens pour fidéliser les lectorats, qui se construisent sur la différenciation des supports par leur griffe ou par leur sérieux, et encore et toujours moins de latitude financière...
Pourtant sur Internet, les lecteurs n'ont jamais été aussi nombreux. Et Google n'a jamais été aussi riche. Moins qu'une crise d'audience, la problématique relève donc d'une crise de la monétisation de l'audience. La gratuité qui prévaut sur Internet, largement sous-tendue par l'offre Google, produit des ravages sur les comptes des entreprises de presse et laisse peu d'opportunités aux services payants, en ligne ou hors ligne, candidats à l'information-pas-comme-ailleurs.
Ce modèle omniprésent du gratuit payé par la publicité comporte cependant un paradoxe décisif à éclaircir. Les journalistes sont-ils en effet vraiment mis en situation d'être rétribués selon la qualité de leurs articles, c'est-à-dire sur la base exacte du pouvoir de consommation des lecteurs qu'ils s'emploient à attirer et à fidéliser ? Face à Google, ou même avec Google comme allié, les sites de presse peuvent-ils contrôler, de façon transparente, la monétisation de leurs audiences respectives ? La réponse tient en un seul mot : NON.

samedi 8 mai 2010

Extension du domaine de la Télé-Réalité


"La sexualité est un système de hiérarchie sociale"... Ce théorème Houellebecquien m'est revenu en mémoire tard vendredi soir, lorsque les hasards de la zapette (si si) m'ont fait découvrir "L'Amour est aveugle". Une nouvelle émission signée par le Big-Brother de la télé-réalité Endemol, diffusée - évidemment - sur TF1, la chaîne "du temps de cerveau disponible"...
Je pensais avoir tout vu en matière de spectacle cathodique décérébré, quelque part entre "Le Loft" et "Secret Story". Erreur. Voilà un reality-show qui repousse encore plus loin les limites du genre. En celà qu'il consacre définitivement la séduction sexuelle comme un système de domination ultra-libéral. Avec ses vainqueurs, mâles dominants et maîtresses femmes, beaux et sexy. Et ses vaincus, handicapés affectifs, mal dans leur peau et/ou moches complexés par leurs corps.

vendredi 30 avril 2010

Don't hate the media, Be the media...Oui mais pas tout seul !


"Ne hais pas les médias, deviens les médias !"...On doit ce slogan coup de poing à Jello Biaffra, chanteur du défunt groupe punk californien Dead Kennedy's et aujourd'hui imprécateur activiste de son état.  Ce "Don't hate the media, become (ou be) the media" reprend aujourd'hui une force  insoupçonnée à la lumière de la révolution numérique. Révolution qui, pour le coup, en est une et pas seulement sur le plan technologique ! Car en permettant à l'individu de devenir un média à lui tout seul et de toucher directement un public avec les blogs, Twitter, et les autres outils de partage "social" de l'information, Internet offre surtout une occasion historique aux journalistes de reprendre en main leur destin. De se réapproprier le journalisme. En évitant au possible l'écueil individualiste et narcissique du "personnal branding". Car si la profession rime souvent avec égo, en matière de presse tout naît et tout renaît paradoxalement du collectif.

samedi 24 avril 2010

Owni, le vaisseau "Enterprise" du journalisme numérique

Quand les vieux médias issus de l'ère Gutenberg sont trop occupés à colmater les brèches pour ne pas couler (fuite des lecteurs, des annonceurs, des talents vers le Web...). Quand ils sont incapables de réfléchir à leur avenir en mode numérique sous la pression des événements qui s'accélèrent et de la pesanteur du passé (la fin de la civilisation du papier)... Et bien le journalisme de demain tâtonne, s'expérimente et s'invente forcément ailleurs : dans les marges informationnelles des blogs et l'avant-garde du Web participatif.  Hier sous l'impulsion d'une première vague de sites d'info hors cadre comme Rue89, Mediapart ou Electron Libre (bravo à ces pionniers qui sont toujours là, trois, quatre ans après, malgré les oiseaux de mauvais augures qui leur prédisaient l'écran noir).
Aujourd'hui chez de nouveaux "pure players" comme Owni dont j'ai envie de vous parler dans ce billet. 
Ce n'est pas moi qui le dit mais le spécialiste américain des médias Clay Shirky, cité par l'excellent site Mediashift : "Quand les écosystèmes changent, quand les institutions s'effondrent, leurs membres se dispersent, abandonnent leurs vieilles croyances, essayent de nouvelles choses, se remettent en question (...). Ce sont les gens qui se demandent comment travailler simplement aujourd'hui bien plus que ceux qui savaient gérer la complexité par le passé qui sont capables d'appréhender le futur".
Parmi ces têtes chercheuses du journalisme numérique en devenir, je citais récemment en exemple Wikileaks : un site spécialisé dans l'investigation sans compromis dont le fonctionnement repose sur le partage de documents sensibles par des journalistes et des citoyens. Mais plus près de nous, il y a donc Owni. Une start-up parisienne (comme on disait il y a dix ans) qui a fait du "Digital journalism" sa profession de foi, en pariant, là aussi, sur une démarche participative désintéressée ("non profit") des journalistes et non-journalistes au service de l'information des citoyens-lecteurs-internautes.